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O comme Objectifs variables
En 35 ans les objectifs et l’argumentaire ont varié afin de justifier le projet
Dans les années 80, le Lyon Turin était en priorité une Ligne à Grande Vitesse pour le transport des voyageurs. Cet argument initial a été abandonné et le transport des marchandises est devenu la priorité. L’hypothèse de la saturation des infrastructures rendait la nouvelle liaison indispensable.
Les prévisions de flux et de saturations se sont révélées erronées. Le Lyon Turin est donc devenu la solution pour favoriser le report modal et capter les marchandises qui transitent le long de la méditerranée ou détourner les flux orientés Nord Sud traversant la Suisse.
Lorsque nous aurons démontré que les gains environnementaux ont également été surestimés, parions qu’un autre objectif verra le jour…
Dès 2015, ces variations d’objectifs sont actées par Monsieur Hubert Du Mesnil, PDG de TELT Tunnel Euralpin Lyon Turin. TELT est le promoteur chargé de la réalisation de la partie commune franco-italienne du Lyon Turin
Extraits de l’interview :
« Au départ, nous sommes effectivement partis sur l’idée d’une ligne à grande vitesse. Dans le contexte de l’époque, la concentration intellectuelle était focalisée sur ce type d’infrastructures. C’était la pensée dominante…. Si nous considérions encore comme utile la construction d’une ligne à grande vitesse à cet endroit, nous aurions tout faux. Aujourd’hui, l’argument initial ne permet plus la justification du projet. »
« Dans les propos tenus à l’origine du projet, il était avancé qu’il fallait construire ce nouveau tunnel de base, car l’ancien arriverait à saturation. Nous avions introduit une idée de justification quantitative ; c’est-à-dire, lorsqu’il n’y aura plus de place pour faire passer les marchandises, il faudra disposer d’une capacité nouvelle. »
« L’argument qui consistait à dire que le tunnel existant allait être saturé n’a plus lieu d’être. Nous sommes passés d’une époque de grande croissance continue à une conjoncture économique difficile. »
« Cette augmentation des flux justifiait la construction d’une capacité nouvelle. L’argument initial n’était donc pas celui du report modal, alors qu’il est aujourd’hui la clef du projet. »
Voir l’article complet : La Tribune – Janvier 2015
Report Modal : L’évolution des trafics de voyageurs et de marchandises est marquée par une prépondérance de la route sur les autres modes. Il est souhaitable de favoriser la modification de la répartition modale des trafics au profit de modes moins polluants
D comme Déclaration d’Utilité Publique
Le projet Lyon Turin fait l’objet de deux DUP Déclarations d’Utilité Publique
La DUP dite des « accès au Lyon Turin » couvre en fait une partie seulement du programme Lyon Turin. La ligne TGV de Lyon à Chambéry et la seconde voie de la ligne fret d’Avressieux à Saint Jean de Maurienne sont exclues de la DUP et reportées à très long termes.
Ces modifications majeures du programme ont un impact sur les performances du projet telles que le gain de temps pour les voyageurs ou les capacités et performances du transport de fret
Les éléments qui ont permis de déclarer l’utilité publique de la section transfrontalière et son tunnel de base sont donc largement affaiblis
C Comme Cartes
Les cartes du projet Lyon Turin largement modifié depuis la DUP de 2007
L’Utilité Publique est déclarée sur la base d’un dossier d’enquête préalable qui présente l’évaluation socio-économique du projet. Ce bilan compare les avantages et les inconvénients pour la collectivité et permet d’apprécier l’intérêt du projet pour la collectivité et sa rentabilité
L’évaluation socio-économique est établie à partir des caractéristiques du projet, des estimations de coûts et des prévisions de trafic voyageurs et marchandises
Depuis la Déclaration d’Utilité Publique de 2007, le projet a été profondément modifié côtés français et italiens. Ces éléments altèrent les performances de la Nouvelle liaison.
La mise à jour de l’évaluation socio-économique révélerait l’Inutilité de La Nouvelle Liaison Lyon Turin
LES CARTES du projet Lyon Turin : Vidéo
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E comme Evaluation socio-économique
La mise à jour de l’évaluation socio-économique révélerait l’Inutilité de La Nouvelle Liaison Lyon Turin
L’Utilité Publique est déclarée sur la base d’un dossier d’enquête préalable qui décrit et analyse le projet : les objectifs, le programme, les estimations de coûts… Ce dossier présente l’évaluation socio-économique du projet qui compare les avantages et les inconvénients pour la collectivité (augmentation des capacités et des performances du transport de fret et de voyageurs, emplois, impact sur l’environnement du chantier et du projet, coûts…). Cette évaluation permet d’apprécier l’intérêt du projet pour la collectivité et sa rentabilité
Ce bilan socio-économique est établi à partir des caractéristiques du projet, des estimations de coûts et des prévisions de trafic voyageurs et marchandises
Depuis la Déclaration d’Utilité Publique de 2007, le projet a été profondément modifié côtés français et italiens. Ces éléments altèrent les performances de la nouvelle liaison. La Cours des comptes a dénoncé la dérive des coûts et le pilotage insuffisant du projet. Les prévisions des trafics voyageurs et marchandises se sont révélées largement surestimées ce qui réduit les conséquences positives du projet
Voir : Référé Cour des Comptes 2012
Alors qu’en 2006, le dossier d’enquête préalable pour la section transfrontalière conclut que c’est le bilan du programme complet (des accès et de la section transfrontalière) qui « reflète l’intérêt de la ligne nouvelle pour la collectivité et l’ensemble des acteurs concernés». Dans son rapport de février 2018, le Conseil d’Orientation des Infrastructures, qualifie les performances socio-économique des accès à la section transfrontalière de « clairement défavorables à ce stade. » Ce constat peut donc être élargi à la section transfrontalière.
Voir page 77 : Rapport du Conseil d’Orientation des Infrastructures
Éléments du bilan socio-économique du dossier d’enquête préalable de 2006
Le dossier présentent deux bilans, celui de l’opération c’est-à-dire la section transfrontalière de Saint Jean de Maurienne à Suse/ Bruzzolo (partie commune) et celui du programme c’est-à-dire la totalité de la nouvelle liaison incluant le Contournement Nord de Lyon jusqu’à Turin
En page 6, il est précisé que les effets globaux du programme révèlent la pertinence de la liaison.
« Le présent chapitre socio-économique présente en priorité les résultats de l’évaluation de la partie commune franco-italienne, mais indique aussi les effets globaux du programme. Ceux-ci révèlent la pertinence de la liaison Lyon-Turin et permettent de comprendre le contexte dans lequel s’insère la partie commune. »
Pour l’opération, en page 73, le dossier indique dans le bilan pour les collectivités que « l’opération est positive pour la France, en raison de la prise en charge d’une plus grande partie de l’investissement par l’Italie ».
Pour le programme, les pages 74 et 75 confirment que c’est le bilan du programme des accès plus la section transfrontalière qui reflète l’intérêt de la liaison et qualifie sa rentabilité de modéré pour les collectivités. « L’évaluation a également été réalisée pour l’ensemble du programme (l’opération et les accès), selon les mêmes paramètres que le bilan de l’opération. C’est le bilan du programme qui reflète l’intérêt de la ligne nouvelle pour la collectivité et l’ensemble des acteurs concernés. » « Ces indicateurs montrent une rentabilité modérée du Lyon Turin du fait d’une composante fret affirmée et d’une gestion prudente du cas de base. »
V comme Voyageurs
Inutilité du Lyon Turin : des prévisions de trafics voyageurs erronées
Pour le trafic international à Modane en 2017, les prévisions de trafics sont trois fois supérieures au trafic actuel
L’Utilité Publique de la section transfrontalière a été déclarée en 2007 sur la base de prévisions détaillées dans le dossier préalable à la DUP de 2006. Analysons ces prévisions de trafics voyageurs.
Le dossier propose des prévisions en situation « de référence » pour 2017 et 2030. Cette situation qui existerait en l’absence de réalisation du programme Lyon Turin sert de point de comparaison pour l’évaluation économique et sociale. L’effet du projet se mesure avec la différence des trafics en situation de référence et en situation de projet
En 2017, le projet n’ayant pas été réalisé on peut comparer les valeurs de trafics mesurées par rapport aux prévisions dans cette situation de référence. Pour le trafic international à Modane en 2017, les prévisions de trafics sont trois fois supérieures au trafic actuel. Le promoteur n’a pas prévu la fin du trafic de nuit. Le nombre de TGV par jour est resté identique depuis 2006
A l’achèvement du projet complet incluant la nouvelle ligne de TGV entre Lyon et Chambéry, aujourd’hui exclue du programme, le promoteur prévoyait 4.1 millions de voyageurs.
Les prévisions de trafics voyageurs sont peu crédibles et la surévaluation impacte le bilan environnemental et socio-économique
Ces prévisions sont confirmées en 2012 dans le dossier d’enquête préalable à la DUP des accès au Lyon Turin alors que les trafics mesurés ont commencé à baisser
T comme gain de Temps
Inutilité du Lyon Turin : des gains de temps irréalistes pour les voyageurs
Le gain de temps inexpliqué et surestimé de 3 heures est depuis 2006 l’argument majeur de la communication des pro Lyon Turin
Le dossier d’enquête préalable à la DUP de la section transfrontalière du Lyon Turin présente des données contradictoires. Le gain de temps de 3 heures entre Paris et Milan valorisé en page 13 de la notice explicative est contredit en pages 44, 45 et 46 de l’analyse socio-économique. La comparaison réalisée sur les temps de trajet théoriques sans arrêt indique un gain de temps de 1h28min
En 2006, le gain de temps de 1h28min est argumenté ainsi :
Nouvelle section transfrontalière Saint Jean de Maurienne – Suse/Bruzzolo : gain de 43 min
La ligne LGV entre Lyon – Sillon Alpin (Montmélian) : gain de 28 min
Second tube de la ligne mixte Sillon Alpin – Saint Jean de Maurienne : gain de 17 min
Or la nouvelle LGV et le second tube de la ligne mixte sont exclus de la DUP des accès aux Lyon Turin et reportés à très long terme. Le seul gain de temps serait donc de 43 min
Avec les éléments connus en 2018, le gain de temps apporté par la section transfrontalière (tunnel de base) serait de 19 min pour un investissement de 8.6 milliards d’euros
Analyse du gain de temps potentiel de 43 min apporté par la section transfrontalière
Les gains de temps théoriques sont calculés avec une vitesse de 220 km/h pour les trains de voyageurs sur une distance de section transfrontalière en 2006 de 74.6 km et comparés au temps de trajet sur une ligne existante de 87 km à une vitesse moyenne de 85 km/h.
En 2017, la vitesse moyenne sur l’itinéraire existant s’établie à 96 km/h sur ces 87 km
Au regard de l’expérience du tunnel sous la manche, il apparait que la capacité d’un axe ferroviaire est lié à l’écart de vitesses entre les trains de marchandises et les trains de voyageurs. Lorsque les écarts de vitesses grandissent la capacité marchandise de la ligne diminue. Sous la Manche cet écart est fixé à 20 km/h. Pour atteindre l’objectif prioritaire du transport de marchandises, il est donc probable que la vitesse des trains de voyageurs sera réduite à 140 km/h. Il semble que cette réduction soit en cours au nouveau tunnel du Saint Gothard suisse
Voir article de Michel Beguelin : Exploitation tunnel du Saint Gothard 1/2
Voir article de Michel Beguelin : Exploitation tunnel du Saint Gothard 2/2
Enfin, en 2018, la distance de la section transfrontalière est de 65 km soit une réduction de 9.6 km
Avec ces nouveaux éléments, le gain de temps de trajet théorique du projet Lyon Turin s’établit à 19 min
T comme Trafics Transalpins de marchandises
L’hypothèse d’un report des trafics en croissance sur l’axe Nord Sud vers les vallées alpines françaises orientées sur un axe Est Ouest est erronée
Selon les pro-Lyon Turin la croissance régulière des échanges européens et la saturation progressive des passages suisses et autrichiens devraient conduire à un transfert des trafics poids lourds dans les vallées franco-italiennes
Analysons les données :
L’évolution du transport de marchandises transalpin français Est-Ouest est dissociée des croissances du trafic de marchandises aux frontières suisses et autrichiennes qui s’orientent Nord Sud
Ce graphique montre que depuis 1999 les fortes augmentations des trafics routier et ferroviaire en Autriche et en Suisse n’affectent aucunement le trafic dans les vallées alpines.
Alors que le nombre de poids lourds baissent aux tunnels du Fréjus et Mont Blanc et que le volume baisse au tunnel ferroviaire du Mont Cenis, les quantités transportées en Autriche augmentent de 41 % par la route et de 34% par le fer.
L’éventuelle saturation à ces frontières est donc largement reportée en effet les capacités ferroviaires suisses et autrichiennes vont augmenter avec la montée en charge du nouveau tunnel ferroviaire du Saint Gothard ouvert en 2016 et la réalisation en cours du tunnel ferroviaire du Brenner
S comme trafic de marchandises en Suisse
La comparaison avec la Suisse n’est pas raison ! Le trafic de transit sur les axes Nord Sud est incomparable avec le trafic d’échange empruntant les deux vallées alpines.
Notes des chamois : Le trafic de transit désigne les transports qui traversent un pays et dont les points de départ et d’arrivée sont hors de celui-ci. Les transports traversent uniquement le pays désigné. Le trafic d’échange désigne les transports qui ont un point de départ ou d’arrivée dans le pays
Le lobby pro-Lyon Turin évoque souvent la Suisse et ses tunnels ferroviaires du Lotschberg et du Saint Gothard comme l’exemple à suivre.
La Suisse subit un fort trafic de transit des marchandises entre l’Allemagne et l’Italie et a choisie de favoriser le mode ferroviaire et de pénaliser la circulation des marchandises par la route.
Les poids lourds traversent ce pays sans apporter de contribution économique (un plein de gazoil et un repas ?), usent les infrastructures et polluent l’atmosphère. La Suisse propose des axes ferroviaires adaptés à cette stratégie. Il est intéressant de constater la faible croissance de la part de transit soit 2.5% en 15 ans. Et pour la première fois en 2017, l’ensemble du trafic marchandises routier et ferroviaire de diminue.
Depuis 1999, les itinéraires routiers du Mont Blanc et du Frejus et ferroviaire du Mont Cenis ne récupèrent pas la croissance du trafic de transit que subissent les autres voies de passages suisses et autrichiennes. Ce sont de fait majoritairement des voies d’échanges entre la France et l’Italie et pour une part importante des échanges entre les régions Auvergne Rhône Alpes et le Piemont. La part du trafic de transit routier et ferroviaire a diminué et s’établit à 10%. Une utilisation moderne de la ligne existante permettrait de gérer ce trafic d’échanges.
Le passage de Vintimille est un itinéraire de transit reliant essentiellement les pays du Sud de l’Europe. Le nombre de poids lourds empruntant cette route le long de la méditerranée est souvent utilisé pour justifier le projet Lyon Turin alors que la solution qui s’impose sur cet axe est le transport maritime.
Ces éléments infirment également l’hypothèse d’un report des trafics de transit de marchandises de l’axe Nord Sud vers les vallées alpines françaises orientées sur un axe Est Ouest.
Voir T comme Trafic transalpin de marchandises
Analysons l’évolution de la nature de trafic entre 1999 et 2014 :
La croissance autrichienne est supérieure. En Autriche, la part du transit dans les transports de marchandises est de 67%. Cette part croît de 30% et s’établit à 69% pour la route et 62 % pour le ferroviaire
La part du transit dans le transport routier au tunnel du Fréjus diminue de 22% et s’établit à 8% et au tunnel du Mont Blanc cette part diminue de 31% et s’établit à 11%.
La part du transit dans le transport ferroviaire au tunnel du Mont Cenis diminue de 31% et s’établit à 9%
Au passage de Vintimille la part du transit dans le transport routier diminue de 5% et s’établit à 56%.
M comme Marchandises
Inutilité du Lyon Turin : des prévisions de trafics marchandises erronées
L’Utilité Publique de la section transfrontalière a été déclarée en 2007 sur la base de prévisions détaillées dans le dossier préalable à la DUP de 2006. La présentation favorable a encore frappé ! Ces prévisions de trafic marchandises sont largement surestimées.
Analysons ces prévisions de trafics marchandises.
Le dossier propose des prévisions en situation « de référence » pour 2017 et 2030. Cette situation qui existerait en l’absence de réalisation du programme Lyon Turin sert de point de comparaison pour l’évaluation économique et sociale. L’effet du projet se mesure avec la différence des trafics en situation de référence et en situation de projet.
En 2017, le projet n’ayant pas été réalisé on peut comparer les valeurs de trafics mesurées par rapport aux prévisions dans cette situation de référence.
Le dossier fait état d’une prévision de 2.7 millions de poids lourds aux tunnels routiers du Fréjus et du Mont Blanc et annonce « de fait d’ici une vingtaine d’année », soit en 2026, « la saturation des deux tunnels ». En 2017, le nombre de poids lourds sur ces deux axes était de 1.362 millions (18.9 millions de tonnes en 2015).
Ce dossier acte une utilisation maximum de l’itinéraire ferroviaire du Mont Cenis à 16.5 millions de tonnes par an. En fait, la baisse des quantités transportées par rail s’amorce dès 2003 et se stabilise à 3.2 millions de tonnes par an.
Il est évident que les prévisions pour 2017 se révèlent erronées et aucun élément ne permet de valider les prévisions de saturation de ces itinéraires alpins.
Analysons les variations de prévisions entre les deux dossiers préalables aux déclarations d’utilité publique de 2006 et 2012
En 2012, de nouvelles prévisions sont établies pour valider l’utilité publique des accès à la section transfrontalière, de Lyon à Saint Jean de Maurienne.
Ces prévisions tiennent compte de la théorie de la « décennie perdue » et incluent donc les effets de la crise économique de 2008 sur les échanges de marchandises.
Il est éclairant de constater que ces prévisions de 2012 actent la surestimation des précédentes prévisions de 2006 (+ 50%).
Les estimations indiquent pour 2017 un trafic routier et ferroviaire de 41.6 millions de tonnes par an alors que le total réel transporté s’établit à 18.9 par la route plus 3.2 par le rail soit 22.1 millions de tonnes.
Il est donc évident que ces secondes prévisions se révèlent également erronées.